20 août. – Je suis arrivée en Suède, hier à 12H45. Ma famille m’attendait. Je suis allée chez eux. Ils m’ont fait visiter la maison. Ensuite nous sommes allés tous ensemble au «supermarket». Le soir nous avons mangé grec : délicieux ! La première nuit j’étais fatiguée. J’ai dormi 13 heures. J’ai été réveillée vers midi par mes parents qui voulaient savoir si j’étais bien arrivée. Chose étrange, mes parents ne me manquent pas, ni mes amis. Vous allez sans doute trouver ça étrange, mais les seules personnes qui me manquent réellement c’est vous, vous l’équipe de PIE, avec qui j’ai passé vraiment des moments extras et aussi tous les jeunes que j’ai rencontrés (certains plus que d’autres d’ailleurs) et je pense plus particulièrement à Jules du Missouri. Voilà, je suppose que ça n’intéresse personne mais j’avais vraiment envie de parler de Jules ! Bref, vous me manquez tous énormément.
Hier nous avons été avec mes deux sœurs sur les bords d’un lac. Nous y avons passé l’après midi agréablement. Le soir nous avons copieusement mangé et joué aux cartes autour d’un verre de champagne. Je vous embrasse. Bisous à Jules (si jamais vous recevez de ses nouvelles du Missouri).
21 août. – Il est 6H09. Ce matin j’ai rendez-vous avec le directeur de mon école. Je me suis levée tôt pour vous écrire. Ca me fait du bien d’écrire à quelqu’un. J’ai appris que mon correspondant local était mon professeur de français. Je trouve ça génial. Je le verrai souvent. Je vais encore vous parler de Jules (que j’ai donc rencontré au stage et qui je crois se trouve du côté du Missouri), j’ai encore rêvé de lui cette nuit ! J’ai rêvé que je lui écrivais (même si, quel dommage, je n’ai pas son adresse) et qu’il me répondait – que nous entretenions ainsi une grande correspondance et que finalement il me demandait en mariage ! Beau petit conte à l’eau de rose, n’est-ce pas ? Je m’excuse de vous raconter tout cela, et de plus vous devez vous dire : «Encore un petit amour d’adolescents !», mais tout ce que je peux vous dire c’est que je crois être amoureuse (même si en une soirée on est jamais sûr). Evidemment tout ça n’a pas grand chose à voir avec la Suède, puisque Jules est parisien, mais quand on quitte un pays qu’on aime bien (on ne s’en rend d’ailleurs compte qu’une fois qu’on est loin) on a sans doute besoin de se raccrocher à quelqu’un qui est dans le même cas.
Vous ne pouvez pas savoir comme ça fait du bien de vous dire tout ça.
23 août. – Je suis en cours de français. Il commence dans 5 minutes. Je me suis fait plein d’amis. Le lycée est vraiment chouette et intéressant. Nous avons des matières obligatoires et d’autres à option. C’est quand je rentre chez moi que j’ai vraiment le cafard. Là je pense trop, beaucoup trop… Je pense de plus en plus à mes parents, que j’adore, à mes soeurs qui me manquent et à vous tous qui m’êtes vraiment indispensables. C’est drôle comme les choses vont vite. Le suédois s’incruste déjà. En cours de français quand je prends la parole, je dois réfléchir à ce que je dis. Ce n’est plus automatique : bizarre !
24 août. – La soeur aînée de la famille vient de partir pour un an aux USA. Quand la mère est revenue de l’aéroport elle pleurait. Ca m’a donné envie de pleurer. Je ne l’ai pas fait car je sais que si je commence je ne pourrai plus m’arrêter. Maintenant mes parents et mes soeurs me manquent vraiment. Maintenant j’en suis sûre, je voudrais que vous m’envoyiez l’adresse de Jules (il était au stage à Paris et partait quelque part du côté du Missouri, je crois. Mais je ne connais pas son nom de famille). Envoyez-moi de ses nouvelles de France. Je commence à m’attacher à la Suède. Je vous laisse, le cours reprend.
25 août. – Je crois que ce qui provoque le cafard quand on est comme ça à l’étranger c’est que l’on se sent vraiment, profondément abandonné. Ce matin, le simple fait de recevoir une lettre de l’organisme suédois m’a remonté le moral. On me parlait des difficultés d’adaptation, de l’école… Ma famille d’accueil insiste pour que je passe un coup de fil à mes parents. Je crois que je le ferai, mais à un moment où j’aurai le moral. C’est marrant, mais depuis que quelqu’un ici m’a dit : «Il faut que tu restes ici toute la vie, tu es très gentille» et ben, depuis ça me fait bizarre. Je sais que c’est faux, mais j’ai l’impression que je ne vais jamais rentrer.
Je vous laisse il faut que j’aille mettre le couvert : on mange.
26 août. – Pour la première fois j’ai pleuré. J’avais ouvert mon portefeuille pour y prendre un timbre et je suis tombée sur la photo de ma petite soeur de 10 ans. Je l’ai regardée, je l’ai trouvée belle, j’ai regardé un peu mieux, j’ai trouvé qu’elle avait un sourire triste, et j’ai pleuré. Mais heureusement une amie était avec moi qui a compris et qui m’a parlé. Je n’ai pas tout compris, mais ça m’a fait du bien qu’elle soit là.
27 août. – 12 H : rien de spécial en vue. 17H39 : une fille que j’avais juste croisée dans les escaliers est venue me voir cet après-midi pour m’inviter à une fête ce soir. J’irai en vélo. C’est à 7 km. Je ne pourrai malheureusement rester que jusqu’à 11 heures, mais c’est déjà génial.
28 août. – C’était sympa. J’ai rencontré beaucoup de monde. Ils m’ont tous posé les mêmes questions. Je commence à me sentir vraiment chez moi.
29 août. – Je suis arrivée tôt au lycée. C’était un peu la panique car j’ai lu que le cours de biologie était «empfunt» et je crois que ça veut dire supprimé mais je n’en suis pas sûre.
Aujourd’hui ma mère d’accueil m’a dit que le départ de sa fille était adouci par ma présence, que j’étais un peu sa remplaçante. J’ai trouvé ça sympa. Cette première marque d’affection m’a fait du bien.
30 août. – Je suis invitée un peu partout : jeudi soir à un concert, samedi à deux soirées.
31 août. – Voilà dix jours que je suis là : tout se passe bien.
13 septembre. – Un mois. Le temps passe vite.
Article paru dans le journal Trois-Quatorze n°23