Tu es heureuse : une famille et des amis extras t’entourent, mais un petit quelque chose te manque. Tu te dis que la banalité s’installe dans ta vie. Tu ne veux pas être de ceux qui n’avancent pas. T’as besoin de te trouver, de te construire. Juste un petit besoin de t’évader, de prendre un nouveau départ ! Voilà comment tout commence. Et me voilà partie. Dans l’avion, je me sens au milieu de tout et au milieu de rien. Je viens de lâcher toutes mes attaches avec mon monde. Je sens comme une poussée d’air. Je suis seule, je survole le nouveau monde. Je ne sais ni où je vais ni ce qui m’attend. Je ne veux plus me poser de questions, juste profiter de ces instants de bonheur. Je sais que quelque chose va changer en moi. J’atterris : boule au ventre, sourire aux lèvres, larmes de joie. J’aperçois la famille, je souris, je sens le stress, ça m’oppresse. Un instant, j’ai peur. Les quelques secondes qui me séparent de tous les membres de ma famille me paraissent une éternité. Puis ce sont les rires, les embrassades, la voiture, la première rue, et plus loin la ville… la maison. Tout est neuf, tout s’enchaîne, tu ne t’ennuies pas.
Les premiers jours, les premiers mois…
Doucement l’habitude fait son nid, elle s’installe, et quand le temps devient maussade, ton coeur se tourne vers ce que tu as laissé là-bas — je veux dire en France — là où la vie continue sans toi. Tu commences à comparer, à critiquer. La mentalité ici ne te plaît pas toujours, la façon de penser, d’enseigner. Les amis, ton lycée, ta famille te manquent. C’est à ce moment-là que tu réfléchis à ce qui t’a poussée à partir : changer, se confronter à du nouveau… Nous y voilà.
J’ai eu beaucoup de mauvaises pensées. Les surmonter fut mon défi. Le relever est devenu une sorte de plaisir. Je me suis remise en question, et j’ai commencé à réfléchir, le sourire aux lèvres. J’ai pensé qu’en acceptant les autres tels qu’ils étaient, ils feraient de même, et j’ai commencé de mon côté par faire un travail sur moi, sur ma culture, sur ma façon d’agir avec
ceux qui n’avaient pas la même façon de vivre que moi. Je me suis passionnée pour les problèmes qui se présentaient. Un exemple : j’évolue dans un milieu très chrétien — où la bible doit être suivie à la lettre —, je me suis donc demandé comment me faire ma place, comment comprendre et accepter en restant assez distante pour ne pas me laisser entraîner — car il n’était pas question pour moi de ne plus agir et réfléchir par moi-même. Alors tout en respectant leur point de vue, j’ai lancé des débats, des discussions, j’ai fait connaître ma position. Je me suis demandé aussi pourquoi les Australiens étaient des personnes aussi zen, relaxes, ouvertes et « friendly »… S’intéresser, forger sa réflexion, à partir de ce que l’on voit, c’est aussi cela voyager. Tu es seule, tu observes, tu comprends : ta timidité qui affleurait toujours s’envole, ta confiance grandit, tu te construis, tu te fais ta place, tu communiques avec tout le monde. Tu deviens la petite « frenchie », tu commences à être acceptée comme tu es… À côté de ça, tu vis, tu t’éclates, tu construis des relations, un réseau, tu ris, tu vois des paysages, t’as les larmes aux yeux, la beauté de ce qui t’entoure t’inonde. Tu reçois beaucoup, alors à ton tour tu veux donner, transmettre. Et puis tu commences à faire un bilan. Tu te mets à écrire et quand plus tard tu relis ton journal, tu te dis « Waoooh ! ». Tu sais que tu aurais fait une grosse erreur de ne pas partir, de ne pas avoir quitté le pays de ta banalité, de ne pas avoir tenté l’aventure.
Chloë, Goulburn, NSW, Un an en Australie