À écouter Jean-Louis parler de son année à l’étranger (USA – 1986), on devine un peu l’état de fragilité qui était le sien avant d’entamer son séjour. Et on comprend vite que cette expérience américaine à l’adolescence —que d’aucuns jugent a priori déstabilisante et inquiétante— a été pour lui source à la fois de stabilité et d’ouverture. Quarante ans après ce voyage de longue durée, Jean-Louis aime à insister sur le fait qu’il a su, à l’époque, remplir son contrat et qu’il a pu démontrer à cette occasion une grande capacité d’adaptation, laquelle, aujourd’hui encore, le caractérise.

En images : Jean-Louis d’hier et d’aujourd’hui (1986/2023)

Prénom : JEAN-LOUIS

Nom : DE LA CHAPELLE

Nationalité : Française

Promo :  1986 / Dinosaure

Destination : Spokane, Washington, USA 

3 enfants

Situation actuelle : Entrepreneur (Hôtellerie / Restauration)

Pourquoi je suis parti avec PIE ?
C’était en 1985-1986. J’avais 16-17 ans. J’étais dans une situation familiale et scolaire , comment dire… Il faut dire, à ma décharge, que nous déménagions tous les ans, que j’étais balloté depuis la 6e de collège en collège. Je perdais à chaque fois tous mes copains, je n’étais pas motivé. Je me dirigeais tout droit vers une impasse. Je crois que j’ai eu conscience de ça. Alors j’ai réfléchi à ce que je voulais faire. Le tourisme m’attirait : l’étranger, l’exotisme, le contact. C’est dans ce contexte que je suis tombé sur une pub sur PIE… ou plutôt une affiche —je ne me souviens plus très bien— … Je crois plutôt une affiche PIE. Cette possibilité de partir une année aux USA, ça m’a parlé immédiatement. C’était exactement ce qu’il me fallait, car pour intégrer une école hôtelière, je devais absolument parler anglais. Et cette idée de vivre toute une année dans une famille stable me séduisait vraiment. En fait l’instabilité qui consistait à partir et à changer de monde équivalait pour moi à une forme de stabilité. J’ai donc construit mon projet comme un “business plan” que j’ai exposé à mon père. Il était partant, Ma mère a été plus réticente, mais elle a fini par être convaincue. Voilà comment je suis parti. Pour être honnête, je dois ajouter que j’avais rencontré auparavant Kim, une Américaine, dont j’étais vraiment amoureux… et l’idée de devenir Américain pendant une année, d’être bilingue et de la retrouver ensuite n’était pas pour me déplaire.

En fait l’instabilité qui consistait à partir et à changer de monde équivalait pour moi à une forme de stabilité

Mon année PIE en trois mots
EXCITATION — Excitation liée avant tout au caractère assez unique de cette expérience. Ce genre de séjour était très peu connu. Personne n’en parlait. La dimension aventure était très forte. Il faut voir ce que représentait l’Amérique à cette époque-là. On avait peu d’images, le décalage était bien plus grand qu’aujourd’hui : c’était vraiment un voyage exotique ! En arrivant, nous avons fait un petit stage de quelques jours sur un campus américain, tout près de New-York (NDLR : le Wagner College, sur Staten Island). C’était un peu magique et chaotique. Je me revois dans l’ascenseur, entouré des joueurs de basket de l’université (qui mesuraient tous une tête de plus que moi (alors que je mesurais 1m94 !). On ne savait pas trop si on était dans le rêve ou la réalité.
ADAPTATION — L’année n’a pas forcément été rose tout le temps. Y’a eu des coups de blues, des tensions (liées notamment à un peu de jalousie du côté de mon frère d’accueil), Mais je me suis adapté et j’en suis assez fier. Il faut dire que je suis bien tombé : une famille (les JEREMIAH) très structurée, avec une mère (Peggy) prof de lettres, un père (Dan) proviseur de High School. J’étais un ado plein de ressources mais qui avait besoin de cadres et ils me les ont apportés. Côté lycée, j’ai découvert pas mal de choses. J’avais des cours très chouettes et intéressants, certains originaux et nouveaux pour moi.
CONTRAT REMPLI — Au final, je suis assez fier d’avoir rempli mes objectifs : j’ai passé toute mon année aux USA, sans changer de famille, c’était un challenge ; j’ai globalement trouvé un peu de cette stabilité que je recherchais. Après trois mois à nager dans la soupe au niveau linguistique, j’ai fini par maîtriser l’anglais (j’ai passé le TOEFL en fin d’année et j’ai même été accepté dans trois universités américaines) ; j’ai obtenu ma graduation ce qui m’a permis d’intégrer une école hôtelière ; et dans la continuité de mon séjour j’ai pu revoir Kim avec qui j’ai entretenu une relation pendant 15 ans !

Une anecdote sur mon séjour
À l’époque, nous avions la possibilité, dans certains États américains, de passer notre permis de conduire. C’est ce que j’ai fait (NDLR : non seulement il n’est plus possible aujourd’hui de passer le permis mais, dans le cadre de ce type de séjour, il est, qui plus est, totalement interdit de conduire… autres temps, autres mœurs !). Un jour que je conduisais, j’ai été arrêté : simple contrôle de police. Mais il se trouve que Mike, un très bon copain, qui était à mes côtés, a été contrôlé par la même occasion et comme il n’avait pas payé ses amendes, ils l’ont conduit direct en prison. C’était impressionnant. Pour l’anecdote, Mike est aujourd’hui avocat et expert en criminologie.

Je crois que j’ai un parcours assez riche, fait de voyages, de diversités de découvertes et je pense que je le dois en partie à ce séjour long à l’étranger qui reste au centre de mon existence : cette année a été LE facteur déterminant.

Mon parcours depuis le séjour
Dans la mesure où je pouvais intégrer un campus américain, j’ai vraiment hésité à rester aux USA, mais je suis finalement rentré en France. J’ai toujours un petit regret de ne pas avoir étudié là-bas… mais c’est ainsi !  Comme j’étais gradué de ma High School, je n’ai pas eu besoin de passer le bac pour intégrer mon école hôtelière : j’ai donc gagné une année (puisque j’étais parti en fin de seconde) !
À mon retour en juillet, j’ai passé un mois en Bourgogne, puis j’ai filé en Angleterre, car j’avais deux stages de longue durée à faire avant de joindre l’école en Suisse. J’ai bossé un an dans un palace à Londres, essentiellement comme “Room Service” (matin puis soir). Je servais et suivais des stars : je me souviens surtout de Sean Connery (très impressionnant). Après l’école hôtelière, j’ai fait mon armée dans les chasseurs alpins, puis j’ai commencé à travailler dans le secteur restauration essentiellement : Groupe Flo à Paris : La Coupole, Chez Julien, Centrale d’achat de Rungis… Puis Noga Hilton à Genève, Villa Belle Rose à Saint-Tropez. Je me suis doucement spécialisé dans le lancement de nouveaux restaurants haut de gamme. J’ai passé une année à New-York chez le pâtissier Alain Payard, puis retour à Paris chez Georges Blanc, puis Splendid à Lyon… En 2018-2019, j’ai un peu bifurqué, en créant deux structures en Thaïlande (Motolino —spécialisée dans les excursions à motos— et De la Chapelle Club —spécialisée dans la production vidéo de présentation d’hôtels et de restaurants). Depuis décembre dernier je suis rentré à nouveau en France

Mon lien à mon séjour aux USA
Je crois que j’ai un parcours assez riche, fait de voyages, de diversités de découvertes et je pense que je le dois en partie à ce séjour long à l’étranger qui reste au centre de mon existence : cette année a été LE facteur déterminant. Il y a une chose qui compte vraiment pour moi : c’est ce sentiment, dont je parlais plus haut, d’avoir rempli mon contrat, et ce malgré les obstacles et les difficultés. C’est une année qui m’a clairement structuré, une année durant laquelle j’ai appris la tolérance, appris à vivre avec des étrangers, appris à vivre en communauté, Je pense avoir fait preuve, tout au long de mon parcours, d’une énorme capacité d’adaptation, et je sais que je le dois en partie à cette expérience.

Si je n’étais pas parti avec PIE
Impossible à dire. J’étais dans une sorte d’instabilité scolaire et, sans ce changement, j’aurais eu du mal, je pense, à me cadrer et à me motiver. Après, je me demande si je n’aurais pas fait une carrière militaire, genre dans l’aviation. Mon grand-père était pilote ; c’était une sorte de tradition familiale ! Oui, j’aurais peut-être suivi cette voie… cela aurait été une autre façon de me structurer et de me stabiliser.