Le système scolaire en Allemagne

Au mois de septembre dernier, PIE lance, auprès de tous ses participants au programme d’une année scolaire à l’étranger, une enquête sur l’école de leur pays d’accueil. Cette enquête porte sur les structures, les horaires, les relations et les objectifs des différents systèmes éducatifs. L’idée est que chaque jeune nous présente l’école (au sens large) au sein de laquelle il vit et étudie. Trois quatorze pose des questions d’abord techniques (qui amènent une certaine quantité d’informations) puis invite les jeunes à émettre leur opinion.

Structure des études en AllemagneLes ‘enquêteurs’ de Trois quatorze ne sont pas des professionnels, et leur travail à ce titre n’est pas forcément exhaustif et exempt d’erreurs, mais il nous paraît cependant particulièrement intéressant d’en rendre compte. Car, même s’il n’est pas d’une rigueur journalistique ou scientifique, ce travail (exécuté, qui plus est, avec conscience et engagement) est le fruit des élèves, autrement dit de ceux qui sont les premiers concernés par les bienfaits et les méfaits des systèmes scolaires *Les présentations qui suivent sont riches en enseignements – d’abord, parce que bien peu de livres ou de journaux présentent les écoles étrangères – ensuite et surtout parce que, émanant de jeunes lycéens français, elles permettent de porter un regard comparatif et donc critique sur notre propre système l En fonction de sa position, profession ou opinion, chacun interprétera ces (trop) courts exposés à sa façon. Pour notre part, cet aperçu nous conforte dans l’idée qu’il ne peut être préjudiciable à un jeune (français ou étranger) de côtoyer un autre système. Il nous renforce dans l’idée de continuer à lutter, avec nos moyens, contre ceux qui pensent que l’enfant qui part vivre une année à l’étranger «prend du retard», «perd une année» ou «voit fondre ses acquis». Les chiffres (voir enquête «que sont-ils devenus» -publiée en 97) prouvent que ‘nos’ anciens se portent plutôt bien, et que ce qu’ils ont pu apprendre lors de cette année d’étude à l’étranger leur sert d’aide et de guide tout au long de leur vie, et que certains des acquis précieux qu’ils ont accumulés (langue, maturité, motivation, expérience) ne leur seront jamais ôtés.

Nous rendons compte dans ce numéro des enquêtes portant sur l’Allemagne, l’Afrique du Sud, les États-Unis et la Russie.

Quelques points pratiques. 1°/ Les présentations sont un condensé d’une ou plusieurs enquêtes. Elles se veulent une représentation d’un travail et d’une opinion plus collective qu’individuelle. 2°/ Certains enquêteurs ont jugé utile de faire intervenir des professeurs. Nous avons décidé de rendre compte des opinions de ces derniers quand nous les jugions intéressantes ou complémentaires

Remerciements à Lydie, Camille, Lucie, Agathe, Stéphanie, Julien, Aline, Amélie, Flora, Natacha, Amandine, Anne, Kevin, Céline, Julia, Elodie, Patrick, Yann, Emilie, Camille, Chloé, Astrid, Anne, Gaëlle, Séverine, Marie-Pierre, Amélie, Liza, Céline, Stella, Lydie, Françoise, Julie, Estelle, Solène, Lisa, Marie, Andrea, Odyssée, Delphine, Clément, Emilie, Yannick, Maé, Marion, Virginie, Cécile, Marie, Jean-Baptiste, Maharid, Alexandra, Amandine… et leurs professeurs.

LE DIPLÔME

Les études secondaires s’achèvent au ‘Gymnasium’ en ‘Oberstufe’ (ces classes correspondent à la douzième et à la treizième année de scolarité). En ‘Oberstufe», les jeunes allemands ont entre 17 et 19 ans – leurs études s’orientent autour de 2 matières principales et de 2 matières secondaires. Pour pouvoir entrer à l’université l’élève doit obtenir ‘l’Abitur’. L’épreuve comporte une partie sous forme de contrôle continu (basé sur les résultats des deux dernières années) et une partie sous forme d’examen final écrit et oral.

RYTHME SCOLAIRE

Exemple d'emploi  du temps dans un lycée en AllemagneLe rythme annuel
L’année scolaire est structurée en deux semestres : de mi-août à fin janvier et de février à fin juin. Le type de matières étudiées et l’emploi du temps varient d’un semestre à l’autre.
Les dates des vacances scolaires sont très variables suivant les régions, mais durent en moyenne 5 à 6 semaines l’été.
Les rythmes hebdomadaire et journalier
Les cours ont lieu du lundi au vendredi (très rarement le samedi). Ils durent 45 minutes. Ils débutent entre 7H30 et 8H00 suivant les ‘Länder’ et finissent entre 13H00 et 13H30 ou entre 15H00 et 15H30 (suivant les jours et suivant les matières choisies). Il n’y a jamais plus de deux après-midi de cours dans une semaine. Le reste de la journée est principalement consacré au sport, aux activités parallèles (club, art…), aux discussions (dans les ‘Kneïppe’), au travail à la maison.
Sur les questions de rythme, les commentaires des jeunes Français sont plutôt enthousiastes : «L’emploi du temps est beaucoup plus léger qu’en France et c’est bien mieux ainsi» – «La méthode allemande me paraît très bonne au niveau du rythme. Les élèves ne passent pas tout leur temps à faire des devoirs» – «Ici, on dispose vraiment de temps pour faire autre chose. Moi, je fais du sport 4 heures par semaine, mais je suis considérée comme une folle.» «Les ‘heures’ de cours sont plus serrées et il y a de vraies plages de repos prévues entre chaque cours. Cela facilite la récupération, donc la concentration, et, par là-même une meilleure attention.» Un professeur ajoute un commentaire : «Les dernières années de ‘Gymnasium’ sont mieux conçues que celles qui les précédent. A mon sens, on en demande trop aux plus jeunes (ils restent en cours tous les jours jusqu’à 14 heures !), et leurs récréations (5 minutes toutes les 30 minutes !) ne me paraissent pas suffisantes.»

Les matières
Jusqu’en fin de 11ème classe (équivalent seconde), les matières sont imposées. A partir de l’’Oberstufe’ s’établit un système assez évolué qui combine matières obligatoires et matières à option. Ce système est très variable selon les ‘Länder’ et selon les établissements. Voici un exemple de ce qui se fait (‘Gymnasium’ de Hambourg) :
Matières obligatoires : Allemand, Maths. Choisir 1 ou 2 matières (une seule si l’on choisit trois langues) parmi : Physique, Bio, Chimie. Choisir 2 ou 3 langues parmi : Anglais, Français, Espagnol, Portugais, Russe. Choisir au moins une matière entre : Art ou Musique, Histoire ou géographie, Philosophie ou Religion ou GMK. Matières à option : toutes les matières non choisies dans les choix précédents + Théâtre, Sociologie, Economie, Orchestre ou Latin.
Les enquêtes font ressortir l’importance de la pratique musicale (cours individuels, orchestre, orchestre de chambre). La pratique du sport est relativement importante (entre 2 et 4 heures) et surtout plus spécialisée qu’en France, puisqu’un étudiant choisit un sport pour toute l’année (basket, foot, judo, karaté, volley, badminton, danse, canoë), et qu’il s’affine dans ce domaine. Un de nos ‘enquêteurs’ regrette cette spécialisation, mais son professeur lui rappelle que ce système n’est valable que pour la dernière année. Ce même professeur signale e revanche que la diversité des options sportives proposées soulève un réel problème d’organisation.
Hiérarchie des matières
Dans le cadre de l’’Abitur’, l’élève allemand se doit de choisir deux spécialisations (matières à coefficient 4) et deux matières secondaires (coefficient 1). Cette orientation amène à une hiérarchisation des matières. Au sommet de la pyramide on trouve généralement : l’Allemand, les Mathématiques et l’Anglais.

RELATIONS ET ATTITUDE

Professeurs / Élèves
Ces relations sont spontanément qualifiées de détendues. On parle de «complicité et d’écoute». «Le cours est essentiellement basé sur la pensée et les réflexions de l’élève, mais il est dirigé par le professeur.» «Les élèves montrent beaucoup de respect envers les enseignants». «Et les profs, dans leur majorité, ont beaucoup d’humour». Quand on évoque les conséquences de ce type de relations sur l’enseignement, les comparaisons avec la France fusent, et les avis sont unanimes : «L’ambiance en classe est bien meilleure – ça discute, ça parlemente, la voix du professeur n’est pas la seule à être entendue – contrairement à la France, le prof en Allemagne n’est ni le roi ni l’empereur.» «Je pense que ces relations sont constructives. Quand on se sent proche d’un prof on a envie de lui faire plaisir. C’est aussi simple que cela ! De son côté, on a plus de plaisir à suivre les cours… On apprend donc plus facilement.» «Les relations sont plus naturelles qu’en France. Si on a un problème de compréhension, les professeurs ont toujours un moment pour nous expliquer.» «Depuis que je suis là, j’appréhende l’école d’une toute autre manière.»

L’attitude des élèves
Les questions guidées font ressortir que les élèves allemands sont plutôt détendus et plutôt heureux d’aller à l’école. Ils sont décrits comme très actifs au sein de cette école («Ils participent tellement et si naturellement qu’au début c’est surprenant»). Ils semblent, dans leur grande majorité, profiter de l’enseignement qui leur est dispensé, mais ne pas être obnubilés, comme c’est le cas en France, par leurs résultats scolaires.

OBJECTIFS

Nos ‘enquêteurs’ sont, dans l’ensemble, peu loquaces sur ce sujet. L’un d’entre eux est cependant très précis : «Il s’agit d’enseigner avant tout des connaissances générales en veillant à préserver un esprit ouvert et une ambiance sympathique. On considère comme très important d’acquérir le goût du travail (aussi important que la méthode). L’esprit critique est très développé. En connaissance pure, la palme revient quand même à la France.»
Niveau.
Les élèves français jugent le niveau général bon, voire excellent. Ils sont surtout «épatés» par le niveau artistique des jeunes Allemands, soulignant plus particulièrement la compétence et la qualité musicale de ces derniers. Certains s’étonnent que le niveau en philo soit moins élevé («ils ne vont pas toujours assez loin»), d’autres regrettent l’absence de dissertation : «cette fameuse ‘dissert’ qui nous fait tant… Je crois qu’il faut la conserver».
Complémentarité par rapport à l’école française
«Ici, on apprend à ne pas être stressé par l’école.» «La qualité de vie d’un écolier est bien meilleure. C’est très profitable.» «Je crois qu’en Allemagne un jeune Français peut acquérir un vrai sens critique. C’est d’ailleurs curieux, car je trouve les Allemands beaucoup trop disciplinés au quotidien, et indisciplinés comme il faut à l’école : toujours vifs, toujours piquants.» «On ressort d’ici avec une formation plus pointue, plus spécialisée et moins générale.»

UNE ANECDOTE

«En début d’année, nous étions 27 en cours de maths. Notre prof s’est exclamé : ‘C’est impossible. Je ne peux pas travailler dans ces conditions. Ce n’est pas pédagogique. Je vais demander qu’on partage cette classe.’ Il était outré. Nous, en France, quand on est 27, on est contents !»

 

Article paru dans le journal Trois-Quatorze n°29